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BRETON André - Lettre autographe signée inédite adressée au critique Charles Estienne : ""Allons, ce n'est pas encore cette fois que dans la révolte je parviendrai à introduire la ""mesure"" que nous prêche aimablement M. Camus.""

Paris 8 janvier 1953, 21x27cm, 1 pages et quelques lignes sur un feuillet. Lettre autographe signée inédite d'André Breton adressée au critique Charles Estienne?; une page et quelques lignes à l'encre noire sur un papier à en-être de la galerie de l'Étoile Scellée. Deux pliures transversales inhérentes à l'envoi, un petit manque angulaire en marge haute droite. Très belle lettre rendant compte de la disparition de l'un des amis les plus chers d'André Breton et de sa brouille avec Albert Camus. Breton fait part à son ami de la disparition de l'artiste surréaliste tchèque Jind?ich Heisler?: «?Votre lettre parlait de ces jours où il semble «?qu'il y ait juste assez de feu pour vivre?»?: c'était bien loin d'être assez de feu lundi, lorsqu'elle me parvenait?: un de mes deux ou trois meilleurs amis, Heisler, pris soudain de malaise en se rendant chez moi le samedi, avait dû être hospitalisé d'urgence et je venais de recevoir le pneumatique de Bichat m'annonçant sa mort. Je suis resté longtemps hagard devant ce fait non moins impensable qu'accompli?: il n'était pas d'être plus exquis que celui-ci, mettant plus de chaleur dans ses entreprises, dont la plus constante était de tout alléger et embellir à ceux qu'il aimait.?» Les deux poètes étaient en effet très proches?: Heisler avait participé, au côté de Breton, au lancement de Néon en 1948 et l'avait soutenu lors d'un épisode dépressif, l'accompagnant avec d'autres amis à l'île de Sein. «?Le début de l'année 1953 est assombri par la mort de Jind?ich Heisler (le 4 janvier). Fidèle entre les fidèles, il «?a vécu intégralement pour le surréalisme?» selon Breton qui rend hommage à son activité d'animateur?: «?C'est ainsi qu'il fut de 1948 à 1950 l'âme de Néon et jusqu'à ses derniers instants le plus grand enfanteur de projets que son génie lui soufflait le moyen de réaliser comme par enchantement.?»?» (Henri Béhar, André Breton) Dans cette lettre empreinte de douleur, Breton fait soudainement référence à L'Homme révolté d'Albert Camus paru deux années plus tôt?: «?Allons, ce n'est pas encore cette fois que dans la révolte je parviendrai à introduire la «?mesure?» que nous prêche aimablement M. Camus.?» Les deux écrivains se rencontrent à New York à la fin mars 1946 alors que Camus est invité aux États-Unis pour une tournée de conférences comme représentant de Combat. «?Tous deux se concertent sur la meilleure façon de préserver le témoignage de certains hommes libres des distorsions idéologiques. Ils rêvent à une sorte de pacte par lequel des gens de leur trempe s'engageraient à ne s'affilier à aucun parti politique, à lutter contre la peine de mort, à ne jamais prétendre aux honneurs quels qu'ils soient.?» (ibid.) Avec d'autres intellectuels, ils fonderont en 1948 le Rassemblement démocratique révolutionnaire (RDR). Cet idylle prendra fin quelques années plus tard, à l'automne 1951, lorsque Camus publiera «?Lautréamont et la banalité?» extrait de son Homme révolté à venir. Breton, extrêmement blessé, lui répond dans un article intitulé «?Sucre jaune?» (in Arts)?: «?Cet article [...] témoigne de [l]a part [de Camus], pour la première fois, d'une position morale et intellectuelle indéfendable. [...] Il ne veut voir en Lautréamont qu'un adolescent «?coupable?» qu'il faut que lui - en sa qualité d'adulte - il morigène. Il va jusqu'à lui trouver dans la seconde partie de son œuvre?: Poésies, une punition méritée. À en croire Camus, Poésies ne serait qu'un ramassis de «?banalités laborieuses?» [...] Il n'y aurait encore que demi-mal si l'indigence de ces vues ne se proposait d'élever la thèse la plus suspecte du monde, à savoir que la «?révolte absolue?» ne peut engendrer que le «?goût de l'asservissement intellectuel?». C'est là une affirmation toute gratuite, ultra-défaitiste qui doit encourir le mépris plus encore que sa fausse démonstration.?» Ainsi, deux ans plus tard, Breton tient encore rigueur du crime de lèse-majesté de Camus envers celui que Breton a érigé en père du surréalisme, mais plus encore, cette allusion à la philosophie pacifiste de Camus, témoigne de l'incompatibilité entre une pensée de la modération et une poésie de la révolution. Exceptionnelle lettre mélancolique sur la disparition des êtres et de l'esprit surréaliste dans ce monde d'après guerre, mais rédigée sur papier à en-tête de la toute nouvelle galerie d'André Breton, l'étoile scellée, qui réussira à faire renaître le phénix surréaliste. - Paris 8 janvier 1953, 21x27cm, 1 pages et quelques lignes sur un feuillet. [ENGLISH TRANSLATION FOLLOWS] Unpublished, handwritten, signed letter addressed to critic Charles Estienne Paris 8 January 1953 | 21 x 27 cm | 1 page and a few lines on one leaf Unpublished, handwritten, signed letter from André Breton addressed to critic Charles Estienne; one page and a few lines in black ink on a paper from the à l'étoile scellée gallery. Two transverse folds from having been sent, a small corner missing in the upper right margin. Very beautiful letter giving an account of the death of one of André Breton's dearest friends and of his quarrel with Albert Camus. Breton tells his friend about the death of the Surrealist Czech artist Jind?ich Heisler: ""Your letter spoke of those days where it seemed ""that there was only just enough fire to live"": on Monday there was far from enough fire, when it reached me: one of my two or three best friends, Heisler, taken suddenly unwell on his way to mine on Saturday, had to be hospitalised urgently and I had just received the pneumatic from Bichat telling me of his death. The event, no less inconceivable than accomplished, left me distraught for a long time: there was no-one more exquisite than he, putting more warmth into everything he did, the most constant of which was to lighten and embellish those whom he loved."" The two poets were indeed very close: Heisler participated, alongside Breton, in the launch of Néon in 1948 and supported him during a period of depression, accompanying him with other friends to the Île de Sein. ""The beginning of 1953 was overshadowed by the death of Jind?ich Heisler (4 January). Loyal among the faithful, he ""lived entirely for Surrealism"" according to Breton, who pays tribute to his activity as a leader: ""This is how he was between 1948 and 1950, the soul of Néon, and until his last moments the greatest bearer of projects that, as if by magic, his talent gave him the means to achieve."""" (Henri Béhar, André Breton) In this letter, laden with pain, Breton suddenly makes reference to L'Homme révolté by Albert Camus, published two years earlier: ""Come on, it is not yet the time in the rebellion that I will succeed in introducing the ""measure"" that M. Camus kindly preaches to us."" The two writers met in New York at the end of March 1946 when Camus was invited to the United States for a conference tour as a representative of Combat. ""The two agree on the best way to preserve the testimony of certain men free from ideological distortions. They dream of a kind of pact by which people of their calibre would commit to not join any political party, to fight against the death penalty, to never claim any credit whatsoever."" (ibid.) With other intellectuals, they founded the Rassemblement démocratique révolutionnaire (RDR) in 1948; but the idyll ended a couple of years later, in the autumn of 1951, when Camus published ""Lautréamont et la banalité"", an extract from his Homme révolté, which was published later. Breton was extremely hurt and responded to him in an article entitled ""Sucre jaune"" (in Arts): ""This article [...] testifies to the part [of Camus], for the first time, for an indefensible moral and intellectual position. (...) He only wants to see a ""guilty"" adolescent in Lautréamont, whom he - in his capacity as an adult - must discipline. He goes as far as to find him in the second part of his work: Poésies, a deserved punishment. According to Camus, Poésies would be but a mass of ""laborious banalities"" (...) It could still be worse if the destitution of these views did not intend to promote the most suspect thesis in the world, which is that ""absolute revolt"" can generate only the ""taste for intellectual enslavement"". This is a completely gratuitous, ultra-defeatist statement, which must incur even more contempt than its false demonstration."" Thus, two years later, Breton still holds out against Camus' crime of lese-majesty towards that which Breton constructed as the father of surrealism, but even more, this allusion to Camus' pacifist philosophy, bearing witness to the incompatibility between a thought of moderation and a poetry of revolution. Exceptional melancholic letter on the disappearance of beings and the surrealist spirit in this post-war world, but written on the letterhead of André Breton's new gallery, L'étoile scellée, which will succeed in reviving the surrealist phoenix.
EUR 3500.00 [Appr.: US$ 3796.43 | £UK 2977.25 | JP¥ 596879] Booknumber: 75729

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