Author: BALZAC Honoré de Title: Lettre autographe signée à Sophie Kozlowska : ""je suis sur les dents ! [...] Je suis ivre de ma pièce""
Description: [Paris] 12 mars 1842, 13,5x26cm, 4 pages sur un feuillet. | « Ah ! si vous saviez quel monde de jolies femmes ! » | * Lettre autographe signée d'Honoré de Balzac à Sophie Koslowska. 4 pages à l'encre noire sur un bifeuillet. Plis transversaux inhérents à l'envoi. De très infimes endroits ajourés le long du pli horizontal du premier feuillet. Publiée dans sa Correspondance 1819-1850, II. Paris, Calmann-Lévy, 1875, p. 31-33. Longue et fébrile missive de Balzac, à quelques jours de la création des Ressources de Quinola au théâtre de l'Odéon, qu'il adresse à sa proche amie Sophie Kozlowska, fille du prince Kozlowski. L'écrivain se confie sur les chaotiques derniers préparatifs et emploie son amie à remplir la salle de toute la haute société russe de Paris. Balzac adresse cette importante lettre alors qu'il s'apprête à prendre l'un des plus grands paris de sa carrière : pour la première des Ressources de Quinola, il voulut convoquer un vrai public, et faire représenter la pièce devant une salle pleine de spectateurs payants - au lieu d'employer les fameux claqueurs traditionnellement installés dans le parterre pour encourager les réactions du public. L'insuccès de cette épreuve sera si bien constaté par tous les journaux, que cette représentation prouvera la nécessité des claqueurs : « L'auteur a préféré le péril. Telle est la raison de cette première représentation, où tant de personnes ont été mécontentes d'avoir été élevées à la dignité de juges indépendants. » (Notes de l'éditeur, Oeuvres complètes, A. Houssiaux, 1855). Faisant fi, avec un bon mot, de la santé fragile de la destinataire (« La Mina m'a écrit que vous étiez malade, et ça m'a porté un coup comme si on avait dit à Napoléon que son aide de camp était mort »), Balzac s'échine à remplir les douze cent places du Théâtre-Français de tout ce que Paris compte de spectateurs de haut rang et grande fortune. Il mise sur les connaissances de sa ""carrissima Sofia"" pour payer les places au prix fort, ce qui lui vaudra d'être accusé de spéculation. Il prend effectivement un soin particulier au détail des tarifs : « Nous jouerons mercredi prochain, à moins de malheur. Les premières découvertes de quatre places sont de cent francs la loge, et tout le monde veut être là. Mais la place fashionable, où sont les Aguado, les Rothschild, les Doudeauville, les Castries, etc., c'est la loge des premières fermées, parce qu'on est chez soi. [...] — Lamartine m'a demandé une loge : je le mettrai entre les Russes. La princesse Troubetskoï n'est pas la même dont je connais le mari. Vous verrez à écrire au prince, — Puis vos Makanof, ne les oubliez pas [...] Ainsi : les balcons, vingt-cinq francs; les stalles, vingt francs; les premières découvertes, vingt cinq francs la place; les deuxièmes découvertes, vingt francs; les deuxièmes fermées, vingt-cinq francs; les baignoires, vingt francs la place. [...] Ah ! si vous saviez quel monde de jolies femmes ! Il n'y aura pas de claqueurs au parterre, qui est mis à cinq francs [...] Écrivez aussi un petit mot à la princesse Constantine Razumovska. Je n'ose pas le faire moi-même. Pour vous et pour votre mère, vous irez aux premières découvertes ; je vous placerai bien. » On perçoit dans ces lignes pressées les grandes attentes de Balzac, qui croyait profondément aux mérites de sa comédie sur un homme de génie industriel, dans l'Espagne du XVIe siècle - dont l'appréciation a certainement pâti des circonstances de sa création. L'écrivain attendait le succès de cette pièce pour régler ses difficultés financières et lui permettre de voyager avec sa chère Madame Hanska. Après avoir fini l'écriture des derniers actes dans l'urgence, il décrit les terribles jours menant à la première : « Je suis accablé, sur les dents! Je fais répéter les acteurs le matin, tout le personnel de la distribution pendant là journée, et les actrices le soir. Il y a dans la pièce pour vingt mille francs de costumes. Les décors sont tout neufs. On me soutient que l'ouvrage est un chef-d'œuvre, et ça me fait frémir ! Ce sera toujours d'une solennité effrayante. » Certaines lignes frisent même la paranoïa, abondamment soulignées de traits rageurs : « Dites à toutes vos Russes qu'il me faut les noms et les adresses, avec leur recommandation écrite et personnelle, pour ceux de leurs amis (hommes) qui voudront des stalles. Il m'en vient cinquante par jour, sous de faux noms, et qui refusent de dire leur adresse; des ennemis qui veulent faire tomber la pièce [doublement ou triplement biffé]. Nous sommes obligés aux plus sévères précautions. Dans cinq jours, je ne saurai plus ce que je ferai. Je suis ivre de ma pièce. Il y a un acteur malade. [...] » Superbe manuscrit d'un Balzac se démenant pour bouleverser les codes du théâtre français — à l'image du personnage de Fontanarès dans les Ressources de Quinola : ""un homme de progrès, rationnel, en butte aux tracasseries d'une masse d'imbéciles, d'inutiles, ou d'arriérés qui ne veulent surtout pas subir de changement"" (Laélia Véron). - [Paris] 12 mars 1842, 13,5x26cm, 4 pages sur un feuillet. [ENGLISH TRANSLATION FOLLOWS] | Balzac's Soon to be Lost Illusion | Autograph letter signedto Sophie Koslowska [Paris] 12 March 1842 ? 13,5 x 26 cm 4 pages on a bifolium Autograph letter signed by Honoré de Balzac to Sophie Koslowska. 4 pages in black ink on a bifolium. Usual folds. Very small lacks of paper along the horizontal fold of the first leaf. Published in his Correspondance 1819-1850, II. Paris, Calmann-Lévy, 1875, pp. 31-33. A long, feverish letter by Balzac, a few days before the premiere of Les Ressources de Quinola at the Odéon theater. The writer writes to his close friend Sophie Kozlowska, daughter of Prince Kozlowski about the chaotic final preparations, and urges her to fill the theater with all of Paris's Russian high society. Balzac wrote this important letter just as he was about to take one of the biggest gambles of his career. The writer wanted to convene a real audience for the premiere of Les Ressources de Quinola, and have the play performed in front of a full house of paying spectators - instead of using the famous claqueurs [clappers] traditionally seated in the parterre to encourage audience reactions (which is described at length in Lost Illusions). His failed attempt was so publicized by all the newspapers that this performance proved the very necessity of claqueurs: ""The author preferred peril. Such is the reason for this first performance, in which so many people were displeased to have been elevated to the dignity of independent judges"" (Editor's notes in Balzac's OEuvres complètes, A. Houssiaux, 1855). ""La Mina wrote me that you were ill, and it struck me as a blow as if someone had told Napoleon that his aide-de-camp had died"": disregarding Kozlowska's fragile health, Balzac set about filling the twelve hundred seats of the Théâtre-Français with all the high-ranking and wealthy spectators Paris had to offer. He relied on the relations of his ""carissima Sofia"" to pay for the priciest seats - an inclination that earned him accusations of speculation. He indeed takes particular care going over prices in the letter: ""We'll play next Wednesday, barring any misfortune. The first seatings with four places are one hundred francs a box, and everyone wants to be there. But the fashionable place, where the Aguados, the Rothschilds, the Doudeauvilles, the Castries, etc., are, is the loge des premières fermées, because one feels at home. [...] - Lamartine has asked me for a box: I'll put him between the Russians. Princess Troubetskoï is not the same one whose husband I know. See to it that you write to the prince, - And don't forget your Makanof [...] So: balconies, twenty-five francs; stalls, twenty francs; premières découvertes, twenty-five francs a seat; secondes découvertes, twenty francs; secondes fermées, twenty-five francs; baignoires, twenty francs a seat. [...] Ah! if you only knew what wealth of beautiful women! There will be no clappers in the parterre, which is priced at five francs [...] Write a note to Princess Constantine Razumovska. I don't dare do it myself. For you and for your mother, you will go to the premières découvertes; I will place you well."" These hurried lines reveal Balzac's great expectations. He deeply believed in the merits of his comedy play about a man of industrial genius in 16th century Spain - although the play's reception certainly suffered from Balzac's poor choices during its premiere. The writer expected to solve his financial difficulties and travel with his beloved Madame Hanska following the play's success. Having finished writing the final acts in a hurry, he describes the terrible days leading up to the premiere: ""I'm overwhelmed, on edge! I have the actors rehearse in the morning, the entire cast during the day, and the actresses in the evening. There are twenty thousand francs worth of costumes in the play. The sets are brand new. I'm told that the work is a masterpiece, and that makes me shudder! It will always be frighteningly solemn"". Some lines even border on the paranoid, abundantly underlined with raging lines: ""Tell all your Russians that I need the names and addresses, with their written and personal recommendation, for those of their friends (men) who will want stalls. I get fifty a day, under false names, who refuse to give their addresses; enemies who want to bring down the play [crossed out multiple times]. We are obliged to take the strictest precautions.In five days, I won't know what I'm doing. I'm drunk on my play.There's a sick actor."" A wonderful manuscript showing Balzac struggling to overturn the traditions of French theater - much like his character Fontanarès in the play: ""A man of progress, rational, up against the hassles of a mass of imbeciles, useless or backward people, who above all do not want to undergo change"" (Laélia Véron). ""In five days, I won't know what I'm doing. I'm drunk on my play""
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Price: EUR 15000.00 = appr. US$ 16302.70 Seller: Librairie Le Feu Follet
- Book number: 86807
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