Author: RILKE Rainer Maria Title: Lettre autographe signée à Elya Maria Nevar : ""Ce que tu as écrit à propos de mercredi dernier, ce mercredi si richement nôtre, m'a réjoui le cœur""
Description: [Munich] Sonntag [dimanche] (3 novembre 1918), 14,4x18,5cm, 2 pages et demi sur un bifeuillet, enveloppe jointe. Lettre autographe signée de Rainer Maria Rilke adressée à l'actrice Else Hotop, à laquelle il écrit sous son nom de scène, Elya Maria Nevar. 2 pages et demi à l'encre noire sur un bifeuillet filigrané « Sackleinen », enveloppe autographe jointe, adressée à 'Else Hotop' portant des cachets postaux en date du 3 novembre 1918. Publiée dans les lettres qu'elle fit paraître sous le titre Freundschaft Mit Rainer Maria Rilke, 1946, p. 35. Précieuse pièce de la correspondance du poète Rainer Maria Rilke, qui reflète les délices d'un après-midi enchanté avec la comédienne Elya Nevar, l'une de ses plus ferventes admiratrices, loin du grondement de la guerre qui faisait rage. « La période vraiment active et créatrice de l'attachement qu'éprouvèrent l'un pour l'autre la jeune Elya et Rainer-Maria, c'est le début de leur amitié, avec la découverte de l'inconnue, la surprise des affinités qui se révèlent, et, enfin, ce qui est si important dans l'amitié comme dans l'amour, cette intimité qui débute dans un automne bavarois, tandis que le tumulte de la guerre gronde au loin » (Marcel Brion). Cette lettre appartient bien aux débuts de sa relation avec la jeune Elya Nevar, « gardienne de sa solitude » pendant la période munichoise du poète, dont l'inspiration s'est tarie entre Malte et les Elégies. Nous sommes à quelques jours de l'Armistice, qui tourne définitivement la page du monde d'hier. Après de brèves rencontres l'année passée, Rilke avait redécouvert Elya - de son vrai nom Else Hotop - pendant l'été 1918, sur la scène du théâtre. Il vint admirer tous les soirs l'actrice de dix-neuf ans sa cadette, qui tenait le rôle d'une princesse médiévale dans une pièce inspirée d'une chanson de geste du XVe siècle. Elle emprunta à son personnage son nom de scène, Elya, par lequel Rilke s'adresse à elle. Leur correspondance commence quelques semaines plus tôt, après une déclaration enflammée d'Elya, véritable adoratrice de son Livre d'Heures : elle « le considère comme LE poète, indétrônable, admirable, et accepte tout de lui, y compris son indifférence » (Rilke, Catherine Sauvat). Romantique et cérébral, le poète se fait en effet pardonner ses absences et son besoin de solitude par une belle déclaration d'affection dans cette lettre : « [...] même si j'ai été repoussé par beaucoup de choses de l'intention de t'écrire tout de suite à ta première lettre, mon attention a été près de toi à beaucoup d'instants et elle l'est à chaque fois que tu penses avoir besoin d'elle, chère enfant ». Malgré cela, ils passeront ensemble des moments de grâce, qui apaisent Rilke, affligé par une crise créative profonde et meurtri par les années de guerre. « je t'aurais demandé de m'envoyer le livre avec tes notes - mais regarde : quand je suis rentré chez moi, tard dans la nuit, il était sur ma table... Et comme tu es déjà familière avec la langue des sceaux dans nos échanges : toi qui es sincèrement attentive. » Sa mention de langue des sceaux fait allusion à l'une de leurs rituelles rencontres du mercredi après-midi chez Rilke ; le poète avait fait cadeau à Elya d'un sceau à cacheter, qui avait la particularité d'être amovible et pouvait accueillir dix cachets à double face, gravés de représentations symboliques accompagnées d'une légende écrite : « Nous avons passé une après-midi à jouer comme des enfants, à graver les vingt sceaux sur une feuille de dessin et Rainer Maria a écrit le texte en dessous de sa délicate écriture. Le livre avec mes notes [mentionné par Rilke ci-dessus] était scellé d'un sceau figurant un masque ancien avec l'inscription « levez-le donc ! » racontera-t-elle. Fidèle à son art, la comédienne avait choisi le masque d'acteur comme symbole. Rilke avait une fascination pour les sceaux ; il scellait sa correspondance avec les armes de ses ancêtres ; et, affaibli dans son château valaisan de Muzot, il souhaitera que ces mêmes armes figurent sur sa tombe et l'accompagnent dans l'éternité. Le poète sera reconnaissant pour cette activité délicieusement désuète aux côtés de sa princesse du Moyen-Age, qui était adepte de son célèbre Livre d'heures éminemment médiéval : « Ce que tu as écrit seulement sur le mercredi précédent, ce mercredi si richement nôtre, m'a réjoui le cœur ». Comme le remarque Marcel Brion, c'est en sa compagnie que Rilke trouvera l'abandon léger, « cette atmosphère de douceur ; de gaîeté, de camaraderie sans arrière-pensée, qu'il savoure auprès d'Elya ». Le poète fait également une allusion à ses sorties musicales et son admiration pour la soprano germano-danoise Birgitt Engell : « J'ai pensé un moment aller au concert de Madame Hoffmann-Onegin mardi, mais depuis de nombreuses soirées, je suis sorti jusque tard dans la nuit, et je le suis encore aujourd'hui et demain. Ce devrait donc être une soirée de sommeil ; et puis, comme Birgit Engell agit encore en moi, je n'ai pas envie d'accepter de sitôt une autre chanteuse, même si c'est la plus excellente. Si tu n'insistes pas pour l'entendre les deux soirs, peut-être resteras-tu avec moi le mercredi pour la soirée ? » Superbe lettre pleine de tendresse à celle qui révéla en Rilke « l'homme gai, plein de fantaisie » (Marcel Brion) dans les années sombres de la guerre. - [Munich] Sonntag [dimanche] (3 novembre 1918), 14,4x18,5cm, 2 pages et demi sur un bifeuillet, enveloppe jointe. [ENGLISH TRANSLATION FOLLOWS] Autograph letter signed by Rainer Maria Rilke Autograph letter signed by Rainer Maria Rilke to actress Else Hotop, to whom he writes under her stage name, Elya Maria Nevar. 2 1/2 pages written on a bifolium watermarked ""Sackleinen"". Autograph envelope enclosed, addressed to 'Else Hotop' bearing postmarks dated November 3, 1918. Published in Freundschaft Mit Rainer Maria Rilke, 1946, p. 35. A precious piece Rainer Maria Rilke's correspondence, reflecting the delights of an enchanted afternoon spent during WW1 with the actress Elya Nevar, one of his most fervent admirers. ""The truly active and creative period of young Elya's and Rainer-Maria's attachment to each other is the beginning of their friendship, with the discovery of the unknown, the surprise of affinities that are revealed, and, finally, what is so important in friendship as in love, this intimacy that begins during a Bavarian autumn, while the tumult of war rumbles in the distance"" (Marcel Brion). This letter belongs to the beginnings of his relationship with the young Elya Nevar, ""guardian of his solitude"" during Rilke's troubled Munich period, where he experienced an inspiration crisis between ""The Notebooks of Malte Laurids Brigge"" and the ""Duino Elegies"". We are just a few days away from the end of WW1. After brief encounters the previous year, Rilke had rediscovered Elya - whose real name was Else Hotop - during the summer of 1918, on the theater stage. Every evening, he came to admire the actress nineteen years his junior, who played the role of a medieval princess in a piece inspired by a 15th-century epic poem. She borrowed her character's stage name, Elya, by which Rilke addresses her. Their correspondence began a few weeks earlier, after an intensely poetic note by Elya who greatly admired his 'Book of Hours' (1905): she ""considers him THE poet, indestructible, admirable, and accepts everything from him, including his indifference"" (Rilke, Catherine Sauvat). Romantic and cerebral, the poet makes up for his absences with a beautiful declaration of affection in this letter: ""[...] even if I was put off by many things from the intention of writing to you immediately at your first letter, my attention has been close to you at many moments and it is so whenever you think you need it, dear child "". In spite of this, they would spend moments together which soothed Rilke, afflicted by a deep creative crisis and affected by the war years. ""I would have asked you to send me the book with your notes - but look: when I got home late at night, it was on my table... And since you're already familiar with the language of seals in our exchanges: you who are sincerely attentive. "" His mention of seal language alludes to one of their ritual Wednesday afternoon meetings at Rilke's house; the poet had gifted Elya a removable seal, which could alternatively house a set of ten double-sided sigils, engraved with symbols and written captions: ""We spent an afternoon playing like children, drafting the twenty seals on a sheet of drawing paper, and Rainer Maria wrote the text underneath in his delicate handwriting. The book with my notes [mentioned by Rilke above] was sealed with a sigil depicting an ancient mask with the inscription 'Lift it up!"" she later recalled. True to her art, the actress had chosen the actor's mask as her symbol. Rilke himself had a fascination for seals; he used the greyhound coat of arms inherited from his Czechoslovakian grandfather to seal his correspondence; and, toward the end of his life living in Muzot, he wished for these same arms to appear on his tombstone and accompany him into eternity. The poet was grateful for this delightfully quaint activity alongside his medieval princess, fond of his eminently medieval 'Book of Hours' (1905): "" What you have written about the previous Wednesday, this Wednesday so richly ours, has gladdened my heart"". As Marcel Brion observes, it was in her company that Rilke found light-hearted abandon, ""that atmosphere of gentleness, cheerfulness, of comradeship without ulterior motive he savored with Elya"". The poet also alludes to his musical outings and his admiration for the German-Danish soprano Birgitt Engell: ""I thought for a moment of going to Madame Hoffmann-Onegin's concert on Tuesday, but for many evenings I've been out late into the night, and I'm out again today and tomorrow. So it should be an evening of sleep; and then, as Birgit Engell is still acting in me, I don't feel like accepting another singer any time soon, even if she is the most excellent. If you don't insist on hearing her both evenings, perhaps you'll stay with me on Wednesday for the evening? "" A wonderful letter full of tenderness to the woman who revealed ""the joyous and playful man"" (Marcel Brion) in Rilke during the dark years of the war.
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Price: EUR 12000.00 = appr. US$ 13042.16 Seller: Librairie Le Feu Follet
- Book number: 86607
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