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Title: Lettre autographe signée de Paul Gauguin : ""je suis doué dit-il à en rendre les autres jaloux""
Description: s.l. (Tahiti) août (1896), 20,5x27cm, quatre pages sur deux feuillets. | ""Oui j'ai du sarcasme en paroles, oui je ne sais pas flatter et plier l'échine, quémander dans les Salons officiels [...] je ne suis plus qu'un intrigant braillard, mais si je m'étais soumis - oui je serais dans l'aisance"" |
* Longue lettre autographe datée d'août 1896 et signée de Paul Gauguin adressée au peintre Daniel de Monfreid. Quatre pages à l'encre noire sur deux feuillets. Petites déchirures marginales sans atteinte au texte, traces de pli inhérentes à l'envoi. En pleine descente aux enfers, abandonné dans son paradis artificiel tahitien, Gauguin se sent maudit : ""Décidément, je suis né sous une mauvaise étoile"" se lamente-t-il. Sa quête de liberté primitive le laisse dans le dénuement et la misère. Souffrant le martyre, le peintre envoie des tableaux à l'un de ses rares soutiens, son fidèle ami Daniel de Monfreid - mais se trompe d'adresse... Publiée dans les Lettres de Paul Gauguin à Georges-Daniel de Monfreid, 1918, p. 146, n° XXIII ; notre lettre révèle le nom d'Émile Schuffenecker, son ami et comparse de la bourse de Paris puis de Pont-Aven - anonymisé dans la version publiée - que Gauguin vilipende à de nombreuses reprises dans ces pages. Cette exceptionnelle missive est écrite à Tahiti, où le peintre était retourné l'année précédente, faisant ses adieux définitifs à la vieille Europe. Gauguin ressort tout juste d'un séjour à l'hôpital de Papeete afin de soigner ses jambes meurtries à la suite de coups reçus à Concarneau deux ans plus tôt, pour avoir défendu sa muse, Annah la javanaise. Le peintre n'échappe pas aux séquelles de cette altercation et souffre d'un terrible eczéma purulent à la jambe mais aussi de sa syphilis, noyant ses affres dans l'alcool. Les lettres de Gauguin de l'été 1896, dont celle-ci est un parfait exemple, ""sentent la fièvre qui s'est emparée d'un esprit surchauffé par la douleur et le manque de sommeil"" (David Haziot). Dans sa confusion, le peintre a mal rédigé l'adresse de l'atelier de Monfreid à la Cité Fleurie, célèbre résidence d'artistes aux allures de chalet où Gauguin avait séjourné : ""Je vous ai envoyé le mois dernier un paquet de tableaux. J'ai bien peur pour eux car il me semble que j'ai mis 55 Bd Arago au lieu de 65"". Dans cet envoi, figurait sa composition Eihaha Ohipa, peinte dans son atelier de Punaauia et désormais conservée au musée Pouchkine de Moscou. Expédiées par l'intermédiaire d'un officier de marine - le port restant à la charge de Monfreid - les toiles n'arriveront qu'en novembre. Au-delà de ses craintes enfiévrées, Gauguin livre dans ces lignes un véritable manifeste de son intégrité d'artiste - pendant parfait de son célèbre autoportrait christique Près du Golgotha que le peintre réalise à la même période. Tout comme dans cette toile, son destin se confond avec celui du Christ : ""dans les moments les plus difficiles de ma vie j'ai plus que partagé avec des malheureux et sans jamais d'autre récompense que le lâchage complet"". Il avait en effet imposé les toiles de Schuffenecker dans des expositions impressionnistes, sauvé son ami Laval du suicide, et ouvert sa bourse à tant d'autres. Au lieu de lui rendre la pareille, Schuffenecker préfère se lamenter sur son propre sort : ""Schuff m'écrit vraiment une lettre insensée et injuste et je ne sais que répondre car c'est un esprit malade [...] qu'il est plus malheureux que moi qui ai la gloire la force la santé. Parlons-en ! Je suis doué dit-il à en rendre les autres jaloux"". Gauguin qui s'est toujours refusé à transiger et se compromettre, est finalement trahi par une de ses plus proches relations, Schuffenecker, qui devient dans la lettre un véritable Judas Iscariote :""Schuff vient de faire une pétition inutile je crois, pour que l'État vienne à mon aide. C'est la chose qui peut le plus me froisser. Je demande aux amis de me venir en aide pendant le temps qu'il faut pour rentrer dans mon argent qui m'est dû, et leurs efforts pour le recouvrer, mais mendier à l'État n'a jamais été mon intention"". Le peintre arrive à un point de non-retour, non seulement meurtri dans sa chair, mais dans son amour-propre : ""Tous mes efforts de lutte en dehors de l'officiel, la dignité que je me suis efforcé d'avoir toute ma vie, perdent de ce jour de leur caractère. De ce jour je ne suis plus qu'un intrigant braillard, mais si je m'étais soumis - oui je serais dans l'aisance. Ah vraiment, voilà un chagrin que je ne comptais pas avoir. Décidément je suis né sous une mauvaise étoile."" Après cet ultime abandon, Gauguin laissera libre cours à sa frénésie artistique et sensuelle dans sa Maison du Jouir aux Marquises. À bout de souffrance et sans le sou, Gauguin clame sa détresse et son orgueil brisé - un Christ Nabi délaissant sa croix, prêt à tomber dans la luxure et l'ivresse du pinceau. - s.l. (Tahiti) août (1896), 20,5x27cm, quatre pages sur deux feuillets. [ENGLISH TRANSLATION FOLLOWS] ""Yes I have sarcasm in my words, yes I do not know how to flatter and bend my back, how to beg in official salons [...] I am nothing but a braying schemer, but if I had submitted - yes I would be comfortable."" ""I'm gifted, he says, to the point of making others jealous."" Autograph letter signed to George-Daniel de Monfreid from Tahiti [Tahiti] août [1896] | 20,5 x 27 cm | 4 pages on 2 leaves Autograph letter dated August 1896 and signed by Paul Gauguin to painter Daniel de Monfreid. Four pages in black ink on two lined leaves. Small tears to margins not affecting the text, traces of folds inherent to sending. *** In the midst of his descent into hell, abandoned in his Tahitian artificial paradise, Gauguin feels cursed: ""Definitely, I was born under a bad star,"" he laments. His quest for primitive freedom leaves him in destitution and misery. Suffering agony, the painter sends paintings to one of his few supporters, his faithful friend Daniel de Monfreid - but writes the wrong address... Published in Lettres de Paul Gauguin à George-Daniel de Monfreid, 1918, p. 146, n° XXIII; our letter reveals the name of Émile Schuffenecker, his friend and associate on the Paris stock exchange and then Pont-Aven - anonymized in the published version - whom Gauguin vilifies on numerous occasions in these pages. This exceptional missive was written in Tahiti, where the painter had returned the previous year, bidding a final farewell to the old Europe. Gauguin had just come out from a stay in hospital in Papeete to treat his bruised legs following the beating he had received in Concarneau two years earlier for defending his muse, Annah the Javanese. The painter could not escape the aftermath of this altercation and suffered from a terrible purulent eczema on his leg, as well as syphilis, drowning his torments in alcohol. The letter is a perfect example of Gauguin's correspondence from the summer of 1896 which ""smells of the fever that has seized a mind overheated by pain and lack of sleep"" (David Haziot). In his confusion, the painter misspelt the address of Monfreid's studio at the Cité Fleurie, a famous chalet-like artists' residence where Gauguin had stayed: ""I sent you a bunch of paintings last month. I'm afraid for them because it seems to me that I put 55 Bd Arago instead of 65"" This mailing included his composition Eihaha Ohipa, painted in his studio in Punaauia and now kept at the Pushkin Museum in Moscow. Shipped via a naval officer - fees to be paid by Monfreid - the paintings did not arrive until November. Beyond his feverish fears, Gauguin delivers in these lines a true manifesto of his integrity as an artist - the perfect counterpart to his famous Christlike self-portrait Near Golgotha, painted around the same period. To him, his destiny and generosity are nothing short of Christ-like: ""in the most difficult moments of my life, I more than shared with unfortunate people and never had any reward other than complete abandonment"". He had in fact helped display Schuffenecker's paintings in Impressionist exhibitions, saved his friend Laval from suicide and opened his purse to so many others. Instead of returning the favor, Schuffenecker prefers to feel sorry for himself: ""Schuff really wrote me a crazy and unfair letter and I don't know what to answer because he is a sick mind [...] he would be more unhappy than me who has glory, strength and health. Let's talk about it! I'm good at making others jealous, he says"". Gauguin, who had always refused to compromise, is finally betrayed by one of his closest relations, Schuffenecker, who becomes in the letter a true Judas Iscariot: ""Schuff has just made a useless petition, I believe, for the State to come to my aid. This is the thing that can offend me the most. I'm asking friends to help me out for the time it takes to get back the money I'm owed, and their efforts to recover it, but begging the State was never my intention"". The painter reaches a point of no return, not only bruised in his flesh, but also in his self-esteem: ""All my efforts to fight outside the official arena, the dignity I have strived for all my life, are now losing their character. From this day I am nothing but a braying schemer, but if I had submitted - yes I would be comfortable. Really, this is a sorrow that I didn't intend to have. Definitely, I was born under a bad star."" After this final abandonment, Gauguin gave free rein to his artistic and sensual frenzy in his Maison du Jouir in the Marquesas. Suffering and penniless, a distressed Gauguin writes of his shattered pride - a Nabi Christ abandoning his cross, ready to fall into lust and the intoxication of the paintbrush.

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Price: EUR 20000.00 = appr. US$ 21736.94 Seller: Librairie Le Feu Follet
- Book number: 84738

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