Author: MARC Franz Title: Lettre autographe signée adressée à sa mère Sophie Maurice
Description: 19 août 1915, 22,2x28,6cm, 2 pages sur un feuillet. Lettre autographe en allemand signée du peintre Franz Marc adressée à sa mère Sophie Marc née Maurice ; deux pages rédigées à l'encre noire. Trace de pli horizontale et verticale. Lettre restée inédite - ne figure pas dans la dernière édition de sa correspondance de guerre (Briefe aus dem Feld, Norderstedt, 2019). Longue et exceptionnelle lettre inédite de Franz Marc adressée à sa mère pendant la Première Guerre mondiale, rédigée quelques mois avant sa mort à Verdun. Dans l'horreur du conflit, le futur martyr de l'expressionisme allemand trouve refuge dans les images de son enfance et les histoires du front vécues aux côtés de ses chers chevaux. Le peintre mystique des animaux, en poste sur le front d'Alsace, raconte une désopilante chasse au sanglier improvisée lors d'une promenade à cheval, qui lui rappelle un conte illustré de son enfance : The Three Jovial Hunstmen de Randolph Caldecott (1880). A travers ses souvenirs, Franz Marc nous dévoile une des sources d'inspiration à l'origine de ses célébrissimes chevaux, qui donnèrent leur nom au mouvement « Blaue Reiter » créé en 1911 avec Wassily Kandinsky. Les chevaux des Huntsmen de Caldecott ressemblent en effet aux toiles de Franz Marc des années 1905-1910. Cette anecdote contée dans la lettre est à l'origine de plusieurs « chevaux chassant » croqués sur le front, ainsi qu'une carte postale illustrée d'un croquis des mêmes « Jagende Pferde », qu'il enverra à la poétesse Else Laske-Schüler en septembre 1915. La lettre plonge dans le quotidien de Franz Marc, qui par une cruelle ironie du destin dut se battre dans la région natale de sa mère Sophie Marc née Maurice, destinataire de cette lettre. Elle était née en 1847 dans le village alsacien de Guebwiller. Lorsque la guerre éclata en août 1914, ce membre fondateur du Blaue Reiter s'engagea en espérant, comme de nombreux artistes et intellectuels, un renouveau de « l'Europe malade ». Circonstances de la guerre obligent, le peintre rédige sa lettre en allemand et non en français, comme il avait l'habitude de le faire dans sa correspondance à sa mère. L'influence de celle-ci fut déterminante dans sa démarche esthétique et spirituelle. Il sera sa vie durant marqué par une inlassable quête de la ""pureté"" héritée du calvinisme maternel, qui le mena peu à peu à l'abstraction, bien présente dans ses croquis au moment même de l'écriture de cette lettre. Alors sous-officier de l'armée allemande, il donne des nouvelles d'une future promotion, remercie sa mère pour son envoi de nourriture et noircit la page du récit de sa chasse miraculeuse : « J'ai encore une histoire amusante à raconter : alors que je partais à cheval à l'aube (avant le petit déjeuner), j'ai soudain remarqué à côté de moi, dans un fossé, un jeune sanglier (un marcassin). J'ai immédiatement appelé mes compagnons de route ; il était encerclé - j'étais déjà désolé pour le pauvre animal, mais la pitié est arrivée trop tard ! - Deux d'entre eux ont sauté, l'un l'a attrapé par les oreilles, l'autre l'a piqué et le rôti pour la table de l'intendance a été récupéré. Une scène des plus comiques s'ensuivit : Nous avons ordonné au plus jeune de rentrer avec le sanglier et nous l'avons fait monter à cheval ; mais à peine le cheval a-t-il senti le sanglier sur son dos (les chevaux craignent beaucoup les sangliers) qu'il s'est cabré et a projeté le cavalier et le cochon dans un grand arc. Heureusement, il ne s'est rien passé et le cavalier embarrassé a dû ramener le sanglier à pied, puis le cheval s'est vraiment cabré dès qu'on l'a approché. Un vrai cavalier du dimanche ! Je pensais au vieux livre d'images anglais de papa : the jovial huntsman ! » Au détour d'une anecdote potache, le peintre dévoile une source d'inspiration encore inconnue des commentateurs de son œuvre. The Three Jovial Huntsmen ont certainement peuplé l'imaginaire du jeune Franz Marc dont les propres chevaux des années 1910 (dont les Weidende Pferde I conservés à la Lenbachhaus de Munich) sont indiscutablement marqués par le style britannique de Caldecott. Il apportera dans les années suivantes sa touche kaléidoscopique et ses emblématiques couleurs bleues, rouges et jaunes chargées de symbolisme spirituel. Les sangliers ne manquent pas non plus au bestiaire de Franz Marc qui les peint en bleu en 1913 (Museum Ludwig, Cologne). Le récit de cette chasse est par ailleurs complètement inédit, puisqu'il demande à sa mère de le raconter à sa femme Maria pour lui éviter d'écrire une deuxième lettre « es ist lang: welch, sowas zweimal erzählen » (c'est long : de raconter deux fois la même chose). Cette anecdote de chasse et de chevaux cabrés peut être directement liée à un croquis réalisé sur une carte postale datée du mois suivant, intitulée « jagende Pferde » témoignant de l'importance de ce moment de répit dans l'atrocité des combats. Ses fameux chevaux deviennent quasiment cubistes sous les dures lignes de graphite, alors que Franz Marc délaisse peu à peu la figuration et s'aventure vers l'abstrait. Les « chevaux chassant » réapparaissent à nouveau sous le même titre dans son Skizzenbuch aus dem Felde (carnet de croquis du front), qui contient les derniers dessins du peintre avant sa mort le 4 mars 1916 à Verdun, à l'âge de 36 ans. Fidèle à sa quête d'absolu, le « Cavalier bleu » endossa l'uniforme Feldgrau de la cavalerie allemande avant de succomber à la réalité mortifère d'une guerre mondiale qui déchira l'Europe et aliéna ses amitiés artistiques d'autrefois. Cette lettre inédite livre certainement un des derniers souvenirs heureux du peintre, entouré des chevaux qui furent le plus important leitmotiv de son œuvre et accompagnèrent ses dernières œuvres croquées sur le front. - 19 août 1915, 22,2x28,6cm, 2 pages sur un feuillet. [ENGLISH TRANSLATION FOLLOWS] 19 August 1915, 22,2x28,6cm, 2 pages on a leaf. Autograph letter in German signed by the painter Franz Marc to his mother Sophie Marc (née Maurice); two pages in black ink. Trace of horizontal and vertical fold. Unpublished letter. Not in the latest edition of his wartime correspondence (Briefe aus dem Feld, Norderstedt, 2019). Lengthy unpublished letter from Franz Marc to his mother during the First World War, written a few months before his death in Verdun. In the horror of the conflict, the future martyr of German expressionism recalls childhood images and tells horse stories from the front. Stationed on the Alsace front, the famed animal painter recounts a hilarious wild boar hunt improvised during a horseback ride, reminding him of an illustrated childhood tale: The Three Jovial Hunstmen by Randolph Caldecott (1880). Franz Marc reveals here an inspiration for his famous horses, which gave their name to the ""Blaue Reiter"" movement created in 1911 with Wassily Kandinsky. The horses in Caldecott's Huntsmen resemble Franz Marc's paintings from 1905-1910. This anecdote is also related to ""hunting horses"" sketched on the front, and a postcard sketch of the same ""Jagende Pferde"" sent to the poet Else Laske-Schüler in September 1915. The letter gives a glimpse of Franz Marc's daily life on the front. By a cruel irony of fate, he fought in the native region of his mother Sophie Marc née Maurice, born in 1847 in the Alsatian village of Guebwiller. When war broke out in August 1914, he joined the army hoping for a renewal of Europe like many fellow artists and intellectuals. Due to the circumstances of the war, the painter wrote his letter in German and not in French, as he was accustomed to do in his correspondence with his mother. His mother's influence was decisive in his aesthetic and spiritual approach: Marc's tireless quest for ""purity"" inherited from his Calvinist upbringing eventually led him to abstraction, already present in his sketches as he wrote this letter. He gives news of a future promotion, thanks his mother for sending him food and fills the page with the story of his miraculous hunt: ""I have one more amusing story to tell: as I was riding out at dawn (before breakfast), I suddenly noticed a young boar (a wild boar) beside me in a ditch. I immediately called my fellow riders; he was surrounded - I already felt sorry for the poor animal, but the pity came too late! - Two of them jumped in, one grabbed him by the ears, the other poked him and the roast for the steward's table was retrieved. A most comical scene ensued: We ordered the youngest [soldier] to go home with the boar and got him on horseback; but no sooner did the horse feel the boar on his back (horses are very afraid of boars) than he reared up and threw the rider and the pig into a great arc. Fortunately, nothing happened and the embarrassed rider had to walk the boar back, then the horse really reared up as soon as he was approached. A real amateur rider! I was thinking of Dad's old English picture book: the jovial huntsman!"" With this light-hearted anecdote, the painter reveals a source of inspiration still unknown to critics and historians. The Three Jovial Huntsmen certainly influenced the young Franz Marc, whose own horses painted in the 1910s (including the Weidende Pferde I, Lenbachhaus, Munich) are unmistakably marked by Caldecott's British style. In the following years, he added to this subject his kaleidoscopic touch and his emblematic blue, red and yellow colors charged with spiritual symbolism. Franz Marc also painted blue wild boars in 1913 (Museum Ludwig, Cologne). The story of this hunt is also completely new, since he asked his mother to tell it to his wife Maria to avoid writing a second letter ""it's long: to tell the same thing twice"". This anecdote about hunting and rearing horses can be directly linked to a sketch on a postcard dated the following month, entitled ""jagende Pferde"", showing the importance of this moment of respite from the atrocity of the war. His famous horses become almost cubist under the hard lines of graphite, as Franz Marc abandons figuration and ventures towards the abstract. The ""hunting horses"" reappear under the same title in his Skizzenbuch aus dem Felde (Sketchbook from the Front), which contains the painter's last drawings before his death on March 4, 1916 in Verdun, at the age of 36. The ""Blaue Reiter"" donned the Feldgrau uniform of the German cavalry before succumbing to the deadly reality of a world war that tore Europe apart. This unpublished letter is certainly one of the last happy memories of the painter, surrounded by the horses that he sketched until the very end.
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Price: EUR 6000.00 = appr. US$ 6521.08 Seller: Librairie Le Feu Follet
- Book number: 82277
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